Prêts pour la tempête ?

Sur les marchés financiers, les désastres frappent généralement de façon inattendue. Néanmoins, le cataclysme est invariablement précédé par des avertissements. Les inquiétudes provoquées plus tôt dans l’année par la perspective d’une normalisation de la politique monétaire américaine peuvent être considérées comme de tels signes avant-coureurs...

Celles-ci ont surtout affecté le monde émergent : les flux de capitaux se sont rapidement taris, les devises ont plongé, tant les obligations que les actions ont subi une correction et, surtout, la foi aveugle dans les marchés émergents en tant que catégorie d’investissement a été largement ébranlée.

Après quelques mois de vents largement favorables, on a pu clairement voir où les vulnérabilités se situaient.

Les pays affichant un important déficit courant, où de solides flux de capitaux à long terme ont propulsé la croissance des crédits à des niveaux extrêmes, où l’inflation est tenace et où les réformes ont été négligées pendant des années ont été les plus touchés.

Ce sont ces pays qui ont été confrontés à la perte de confiance la plus marquée. Les principaux sont le Brésil, l’Inde, l’Indonésie, la Turquie, l’Afrique du Sud et la Thaïlande.

La bonne nouvelle pour ces pays est que la tempête a connu une accalmie après le mois d’août. En septembre, la Fed a décidé de reporter le démantèlement de son assouplissement quantitatif pendant un certain temps et les investisseurs ont recommencé à croire dans les marchés émergents. Depuis lors, le calme s’est plus ou moins maintenu et les marchés en difficulté ont eu l’opportunité de remédier à leur vulnérabilité. Le coup de semonce a été sans équivoque, mais à en juger d’après les mesures relativement limitées prises par les pouvoirs publics, il n’a apparemment encore été assez clair.

Il y a bien sûr des différences en ce qui concerne la façon dont les pays individuels ont réagi. L’Indonésie, le Brésil, la Turquie, et finalement l’Inde aussi, ont relevé leurs taux d’intérêt au cours de ces derniers mois afin de réduire le risque aigu de fuites des capitaux et de lutter contre l’inflation et les déficits commerciaux. Ceci était une décision évidente et elle pourrait avoir contribué à éviter des turbulences majeures sur les marchés.

Malheureusement, tous les pays, à l’exception peut-être de l’Indonésie, restent extrêmement passifs en matière de réformes structurelles.

Des mesures sont en effet indispensables pour améliorer le climat d’investissement et la compétitivité, ce qui permettrait de s’attaquer aux déficits et de faciliter les investissements en infrastructure.

De telles décisions sont essentielles, mais aussi politiquement très sensibles. Alors que des élections auront lieu l’année prochaine en Indonésie, au Brésil, en Turquie et en Afrique du Sud, il est virtuellement impossible de réaliser ce qui est nécessaire. Ceci a été clairement démontré. Entre-temps, les déséquilibres grandissent, de même que la vulnérabilité de ces pays. Il n’y a pas ou guère de réduction des déficits sur la balance courante en dépit de la croissance plus faible et l’inflation continue à augmenter.

Dès que la Fed commencera à réduire ses injections de liquidités au début de l’année prochaine, les pressions sur le monde émergent devraient croître à nouveau.

Les dommages seront finalement bien plus élevés qu’ils ne l’auraient été si les gouvernements avaient tenu compte de l’avertissement de cette année.

Maarten-Jan Bakkum , Décembre 2013

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