Perspectives 2013 des obligations mondiales : Adopter une approche passive ne devrait pas permettre de s’enrichir cette année

Bob Jolly, responsable de la stratégie Global Macro au sein de l’équipe de gestion de taux de Schroders, nous présente ses perspectives pour 2013.

Les rendements obligataires des marchés développés étant toujours très bas et les spreads de crédit largement inférieurs à ceux de l’année dernière, adopter une approche passive face au bêta du marché obligataire mondial ne devrait pas permettre de s’enrichir cette année. Il serait surprenant que les performances obligataires de 2012 se reproduisent en 2013. Toutefois, les mêmes fluctuations sont susceptibles de se répéter, les marchés oscillant entre euphorie, lorsque la croissance ou les dirigeants politiques créeront des surprises agréables, et dépression, lorsque les dirigeants mettront collectivement le pied sur le frein des réformes ou lorsque la dynamique économique ralentira.

Un long chemin parsemé d’embûches

L’année dernière, nos perspectives obligataires mondiales reposaient sur le néologisme de la « japonisation ». Nous pensions il y a douze mois que, même si les économies occidentales présentaient quelques similitudes avec le Japon alors que la crise du crédit prenait forme, il existait des différences cruciales tant de rapidité que d’ampleur des mesures prises par leurs dirigeants, ce qui avait réduit les risques d’une décennie perdue à la japonaise pour les pays occidentaux. Avec le recul, il s’avère que nous avions globalement raison : à savoir que les différences étaient suffisantes pour suggérer que les marchés des actions et du crédit récompenseraient généreusement les investisseurs pour les risques assumés.

Au cours de l’année 2012, les attentes du marché ont radicalement changé quant à l’horizon à partir duquel un changement dans la politique monétaire accommodante actuelle pourrait intervenir. Un retour à la normale semble de moins en moins imminent. Pour cette raison, le chemin restant à parcourir semble non seulement long mais aussi parsemé d’embûches.

Tracer la voie à suivre

Les performances de 2012 sont peu susceptibles de se répéter en 2013. Les rendements à ceux du début d’année, des obligations et des crédits des marchés développés sont largement inférieurs, surtout ceux des obligations d’entreprises. Les autorités ont réussi à faire refluer les spéculations d’effondrement chaotique de la zone euro ce qui a engendré un resserrement des spreads des pays périphériques par rapport à ceux des pays centraux. En 2013, où trouverons-nous les opportunités pour dégager des performances ajustées du risque attractives ? Avant de consulter notre boule de cristal, nous pouvons nous baser sur certaines observations pour définir les conditions du marché et le contexte économique.

L’époque ne se prête pas à la passivité

Premièrement, il semble évident que, sur les marchés obligataires, une approche passive face au bêta du marché ne permettra pas de s’enrichir. Les taux d’intérêt à court terme étant inférieurs à l’inflation, les investisseurs se sont réorientés vers des obligations et des crédits à plus long terme, ce qui a fait chuter les rendements obligataires. Aujourd’hui, de nombreux indices d’obligations d’État offrent des rendements nominaux inférieurs aux taux d’inflation. Après la reprise marquée de 2012, les spreads des obligations d’entreprises sont redescendus à des niveaux où le rendement peut être positif en termes réels mais ne permettra probablement guère une forte valorisation des portefeuilles.

La politique : de nouveau, un facteur-clé

Deuxièmement, les marchés seront probablement ballotés par deux facteurs opposés, à savoir la politique et l’économie. En 2012 un des moteurs de la volatilité fut le fait qu’une mauvaise politique peut faire empirer une situation déjà défavorable. D’ordinaire, les marchés peuvent compter sur les dépenses publiques ou sur l’assouplissement des banques centrales pour soutenir l’économie en cas de détérioration des prévisions de croissance à court terme due à des chocs nationaux ou externes. Aujourd’hui, avec très peu de marge de manoeuvre, l’impact de tout choc, dû par exemple au prix du pétrole ou à la politique budgétaire, serait beaucoup plus défavorable qu’en conditions normales car les solutions politiques sont beaucoup moins nombreuses. Au Moyen-Orient, bien que la situation se détériore puis s’améliore régulièrement, les problèmes sont loin d’être résolus.

Aujourd’hui, avec très peu de marge de manoeuvre, l’impact de tout choc, dû par exemple au prix du pétrole ou à la politique budgétaire, serait beaucoup plus défavorable qu’en conditions normales car les solutions politiques sont beaucoup moins nombreuses.

Les responsables politiques doivent toujours renflouer le « bilan » de leur pays et, la croissance des pays occidentaux étant susceptible de rester léthargique, dans un contexte d’austérité budgétaire pro-cyclique, les économies auront besoin de la plus grande aide possible de la part des banques centrales. Les politiques, qui veulent conserver leur popularité ont du mal à mettre en oeuvre des réformes structurelles et des politiques impopulaires. Les marchés haïssent l’incertitude, peut-être même plus que les mauvaises nouvelles. L’incertitude qui règne sur la mise en oeuvre de réformes structurelles et sur la volonté des gouvernements à commettre une forme de « suicide politique » alimente donc la volatilité du marché.

Des marchés sous pression

Bien que les réformes économiques aient alimenté ait alimenté les débats en 2012, ce sont les marchés qui l’ont fait se matérialiser en forçant les responsables politiques à prendre les mesures appropriées. Avec un peu de cynisme on constate que, une fois disparues les pressions qui pesaient sur les marchés et les dirigeants politiques, la volonté de ces derniers à exécuter les changements requis a elle aussi disparu.

Par exemple, pourquoi le gouvernement espagnol n’a-t-il pas signé le protocole d’accord, politiquement défavorable, envisagé pour que la BCE l’aide à assurer ses besoins de financement ? La réponse la plus évidente est la diminution des pressions en provenance des marchés.

Le risque d’une bataille, voire d’une guerre, sur les marchés des changes augmente.

Savoir passer son tour

Le mantra suivi avec succès par l’équipe de gestion de taux multi-secteurs de Schroders en 2012 consiste à « passer son tour plutôt que suivre à tout prix ». Il s’agit d’acheter en période d’extrême nervosité du marché et de vendre en période d’optimisme débordant.
Nous pensons que les mêmes fluctuations sont susceptibles de se répéter en 2013, les marchés oscillant entre euphorie, lorsque la croissance ou les politiques créeront des surprises agréables, et dépression, lorsque les dirigeants mettront collectivement le pied sur le frein des réformes ou que la dynamique économique ralentira.

Tendances à surveiller en 2013

Nous pensons que plusieurs thèmes importants viendront sur le devant de la scène en 2013 :

1. La France aura du mal à garder la confiance des marchés.. L’économie française reste très sensible aux mesures prises par l’État et, ce dernier étant des plus interventionnistes, l’économie perd de son importance sur le plan international. Sa santé budgétaire continuera probablement de se détériorer et, en 2013, les acteurs du marché pourraient bien montrer leur mécontentement en retirant des capitaux du le pays, et mettre le gouvernement français sous pression pour qu’il introduise des réformes structurelles plus rapides.

2. L’Espagne finira par signer le protocole d’accord, probablement sous la pression du marché et des responsables politiques de l’UE.

3. Le Royaume-Uni connaîtra des difficultés avec une inflation persistante. L’inflation jouant le rôle d’un impôt sur le consommateur, la croissance économique continuera de stagner. La stagflation aura un impact fortement négatif sur les actifs britanniques et sur la livre sterling.

4. Le Japon finira par prendre au sérieux le problème de déflation. La planche à billets pourrait tourner deux fois plus vite que par le passé. Le yen japonais en sera probablement la principale victime.

5. Les pays asiatiques, en particulier la Chine, introduiront des mesures visant à stimuler la consommation intérieure. Le changement des différents facteurs de croissance créera des pressions baissières sur certaines matières premières industrielles. Les beaux jours du dollar australien pourraient bien être derrière lui compte tenu de l’évolution de la demande des principaux produits d’exportations du pays.

6. Le « mur budgétaire » des États-Unis se transformera en un « muret ». Le pays est sur le point d’entamer une longue période d’austérité budgétaire et la politique monétaire accommodante continuera d’avoir un certain effet de compensation.

7. Les ménages comme les gouvernements continueront de renflouer leurs bilans ; la répression financière est là pour durer. La croissance parviendra tout juste à ne pas stagner.

8. Le risque d’une bataille, voire d’une véritable guerre, sur les marchés des changes augmente. Tous les pays occidentaux veulent stimuler leurs exportations afin de soutenir leur croissance. Or, le meilleur moyen de stimuler ses exportations est d’augmenter sa compétitivité en dépréciant la monnaie de son pays. Les pays asiatiques subiront probablement des pressions pour que leurs monnaies s’apprécient plus rapidement, afin de favoriser la transition.

9. Le Moyen-Orient pourrait éviter que la situation n’explose, mais les tensions persisteront. Les marchés sous-estiment probablement les risques, surtout le risque de chaos économique qu’un baril de pétrole à 200 dollars ne manquerait pas d’engendrer.

Bob Jolly , Janvier 2013

Partager
Envoyer par courriel Email
Viadeo Viadeo

Focus

Stratégie Révolution indicielle dans les Hedge funds

Une critique courante des modèles factoriels repose sur le fait qu’ils ne "répliquent que le bêta" - pas l’alpha pur que recherchent les allocataires. Cette critique est antérieure à l’appréciation des rotations factorielles. L’analyse d’Andrew Beer, dirigeant et co-fondateur de (...)

© Next Finance 2006 - 2024 - Tous droits réservés